Andrée Chedid est née au Caire, en 1920, de parents libanais, « une famille cosmopolite ». A 16 ans, elle écrit déjà de la poésie, « comme ça, c'est venu tout seul ! ». En 1946, elle s'installe à Paris, avec mari et enfants.
Depuis, elle couche sur ses feuillets gribouillés des histoires de guerre et d'amour, de peine et de bonheur. Elle brasse le monde, interroge le temps, la vieillesse, affronte la bêtise, chante la joie, clame la réconciliation.
Andrée Chedid est une indécrottable optimiste. Elle puise sa foi chez « les gens ». Les raconter, les écrire, c'est, pour elle, leur donner l'éternité.
Cette infatigable optimiste est décédée en 2011 à Paris à l'âge de 90 ans.
Article paru dans Télérama le 14 octobre 2000
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Vous écrivez en français ?
Je parle trois langues : l'arabe, l'anglais, le français. Mon premier recueil de poésie, je l'ai écrit en anglais. Il me semblait plus apte à jouer avec les mots. Ensuite, j'ai toujours utilisé le français : j'aime sa clarté, sa précision. Il éclate. Le fait d'être femme et orientale me donne un excès de sensibilité [rires]. Passer par le cristal de la langue française m'oblige à la rigueur. Mes feuillets sont couverts de corrections de toutes les couleurs. Ensuite, je saisis les textes sur un ordinateur. Il en fait souvent à sa tête, mais je l'insulte ! Je navigue sans cesse dans les dictionnaires, mieux qu'un voyage, ils offrent la liberté.
La liberté ?
D'aller d'un mot à l'autre, d'une émotion à l'autre, d'un monde à l'autre.
Et vous, vous avez toujours été libre...
La liberté, chez moi, c'est un instinct. Je fuis les catégories, j'ai horreur des étiquettes. Je n'ai jamais eu d'obligations, j'ai toujours écrit ce que je voulais, quand je le voulais. Je n'ai jamais eu à souffrir de l'emprise familiale ou des modes de pensée. J'ai eu cette chance d'être libre. Mes parents étaient divorcés, et cela, sans doute, a forgé mon esprit d'indépendance. Si l'on est enraciné dans son milieu d'origine et ce jusqu'à la fin de sa vie, on est comme agrippé par un lierre qui enserre, étouffe. On se prive des richesses du monde. Et on ne peut pas être soi
Et le goût d'écrire ?
Non, ça c'est venu tout seul. Je ne suis pas une lectrice acharnée. J'ai une culture moyenne [elle sourit]. J'ai un esprit pas très logique [elle éclate de rire]. Mais j'ai la passion de vivre. Je saisis les choses, comme ça, par brassées, les visages, les gens. Je suis bouche bée devant les gens.
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